Résumés des communications
15h45-17h45 Ateliers A (salles bâtiment B, campus 1) Atelier A1 : Nouvelles méthodes et nouveaux établissements aux XVIIe-XVIIIe siècles. Discutante : Angélique BLANC-SERRA. Salle B1-117 Jean-Luc Le Cam, Centre François Viète, Institut Brestois des Sciences de l’Homme et de la Société, UR1161, université de Bretagne occidentale Des lieux communs aux cahiers d’extraits : les applications pédagogiques des innovations de l'érudition lors de la première modernité Le début de l’époque moderne voit un double renouvellement : d’une part, les humanistes, inspirés par la rhétorique antique, remettent au goût du jour l’emploi des lieux communs et constituent des florilèges ; d’autre part l’inflation de la production livresque du fait de l'imprimerie contraint les intellectuels à inventer de nouvelles méthodes de prise de notes et de conservation du savoir aux fins de réemploi. Si les spécialistes d’histoire littéraire ou des pratiques savantes ont déjà exploré ce champ de recherche, l’histoire de l'éducation ne s'est guère intéressée aux retombées de ces innovations dans le domaine pédagogique. Cette communication illustrera d'abord la transformation des outils d’enseignement sous l’emprise de cette nouvelle approche, puis présentera les premières méthodes enseignant la prise de notes et la constitution de cahiers d’extraits, avant de voir plus précisément, à partir d'exemples allemands du XVIIe siècle, comment ces habitudes de travail s’exerçaient dès l'école latine et a fortiori dans les études supérieures. À cette fin, différentes sources éclairant l’activité scolaire et universitaire, ou des pratiques personnelles, seront mobilisées. Ainsi sera mis en lumière le cas d'un processus de diffusion d’innovation par imitation et transfert la plupart du temps informel, qui tranche avec le schéma descendant habituel de l’histoire des idées et des institutions. BLAIR, A. (2010). Too Much to Know : Managing Scholarly Information before the Modern Age. Yale : University Press. Aurélien Ruellet, Centre National de la Recherche Scientifique, Temps, Mondes, Sociétés, Le Mans Université, Université d’Angers, Université de Bretagne Sud Dès la Renaissance, la critique des vieux maîtres, comme le rejet des objectifs et des moyens d'une pédagogie jugée périmée, vont de pair avec la promotion de méthodes qui s’affichent comme nouvelles. Le ramisme, le baconisme, la pansophie coménienne, les divers plans des études (jésuite, oratorien) en sont parmi les exemples les plus connus. La prétention à l’innovation s’affiche aussi dans les titres et les sous-titres d’innombrables ouvrages pédagogiques des XVIe et XVIIe siècle, souvent en lien avec d’autres mouvements culturels, comme celui de la réduction en art ou la promotion d'une philosophie nouvelle (comme le cartésianisme). Singulièrement au XVIIe siècle, enseigner bien, c’est enseigner d’une façon nouvelle (et pourrait-on ajouter « claire », « brève » et « facile »). Que ce soit en France ou en Angleterre, cette nouveauté revendiquée se pare parfois de protections officielles, par le biais de privilèges ou d’une forme de bienveillance à l’égard d’initiatives concourant à la « réforme » des royaumes. Cette communication examinera quelques discours de la nouveauté, essentiellement à partir des terrains français et anglais et les confrontera aux réalités des pratiques pédagogiques. GRANDIERE, M. & LAHALLE, A. (dir.) (2004). L’innovation dans l’enseignement français (XVIe-XXe siècle). Nantes, Lyon : SCEREN CRDP Pays de la Loire/INRP. Etienne Mottin-Struye, université Lyon 2 Parmi les éducateurs prônant l’apprentissage de la lecture en français avant le latin, il en est un qui s'est démarqué par sa transposition didactique : Jean-Baptiste de La Salle. Considéré jusqu’à présent comme perdu, son Syllabaire français retrouvé en 3 éditions (1766 et 1770) manifeste une singularité didactique dans l’histoire moderne. Jean-Baptiste de La Salle a conçu une didactique dont la difficulté est assumée. Le devenir du syllabaire est jalonné d'éditions de 1698 jusqu’à son abandon en 1790. Cette réforme lasallienne à contresens de ses contemporains s’est muée en recette intouchable après la mort de son auteur, pour finir effacée de la tradition des Frères. De quelles circularités entre novations et reculs de l’histoire ce Syllabaire français est-elle représentative ? Anne Ruolt, HDR, chercheuse associée au CIRNEF (UR 7454), LISEC, GSRL, professeur à l’Institut biblique de Nogent Nous ambitionnons de présenter l’institut de Glaucha ou la fondation Francke de Halle, l’œuvre éducative d’August Hermann Francke (22 mars 1663 à Lübeck - 8 juin 1727 à Halle), en Allemagne (Saxe-Anhalt), au XVIIIe siècle et de questionner ses pratiques pédagogiques. S’agit-il d’une institution innovante, d’une réforme éducative ou d’une expérimentation maillon d’une généalogie de pratiques révélatrice d’une philosophie germanique qui va rayonner dans cet espace géographique à l’époque ? Autrement dit, entre la première école de charité ouverte en 1695 dans la sacristie de l’Église luthérienne du quartier de Glaucha dont Francke est le pasteur, le Pædagogium pour les enfants de la noblesse en 1695, l’école en latin ou gymnase, pour les enfants de la bourgeoisie se destinant aux études universitaires, en 1697, l’orphelinat inauguré en 1701, l’école normale ou séminaire, l’imprimerie etc., est-on face à de l’innovation pédagogique, ou plutôt à une réforme institutionnelle, ou à une expérimentation dont le rayonnement a forgé les idées éducatives dans le monde germanique, idéologiquement préparé à cela. Si la connaissance de l’œuvre de Francke est fondamentale pour comprendre l’enseignement des néo-piétistes : Niemeyer, Schleiermacher, etc., et les situer dans la généalogie des idées éducatives qui vont marquer l’histoire de l’enseignement le siècle suivant, en miroir, la méconnaissance de Francke en France, qui fait l’originalité de cette proposition de contribution, offre aussi à interroger l’héritage idéologique français en matière d’éducation. CHALMEL, L. (2004). « Piétismes », in Réseaux philanthropinistes et pédagogiques au 18e siècles. Berne : Peter Lang, 27-34. Sylvain Wagnon, LIRDEF, université Montpellier 2 Alexis Sluys (1849-1936) est un pédagogue et réformateur belge qui demeure encore largement méconnu dans l’historiographie. Pourtant, instituteur puis directeur de l’École normale d'instituteurs de Bruxelles de 1880 à 1909, il n’a cessé d’initier et de mettre en place des innovations pédagogiques. En collaboration avec son ami le pédagogue Paul Robin et s’inspirant de l’expérience pédagogique de Cempuis, il a développé une approche éducative intégrale en introduisant le dessin, la musique et la gymnastique dans l’enseignement. En tant que dirigeant de la Ligue de l’enseignement belge et franc-maçon engagé, il a promu un enseignement laïc. Pour cette contribution, nous nous appuierons à la fois sur ses écrits, en particulier sur ses mémoires, mais surtout sur l’analyse inédite des archives du Grand Orient de Belgique. Nous pourrons ainsi examiner ses propositions pédagogiques mais aussi la circulation et l’influence de ses propositions pédagogiques dans et hors de la Belgique. GROOTAERTS, D. (Ed.). (1998). Histoire de l’enseignement en Belgique. Bruxelles : C.R.I.S.P. Henri Peyronie, CIRNEF (UR 7454), université de Caen-Normandie Freinet est connu du plus grand nombre ; seuls quelques historiens de l’éducation nouvelle connaissent Delaunay. Ils ont pourtant connu des trajectoires proches : une formation au métier d'instituteur dans une école normale (entre 1900 et 1903 pour Delaunay, entre 1912 et 1915 pour Freinet) ; une participation douloureuse à la guerre 1914-1918 ; instituteurs ruraux pendant l’Entre-deux-guerres ; un même engagement dans le syndicat enseignant « révolutionnaire » (la Fédération unitaire de l’enseignement) ; une même implication pour l’écriture dans des revues pédagogiques ou syndicales (dont l’École émancipée) ; des références et un engagement dans des courants de l’Education nouvelle ; de multiples échanges entre eux... Le corpus de cette étude est essentiellement constitué des écrits de ces deux pédagogues, enrichis de quelques apports biographiques. On se propose de montrer comment l’hybride « tâtonnement expérimental » de Freinet (mobilisant innovation et expérimentation) et la force d’un collectif fonctionnant sur le mode coopératif ont suscité une postérité, dans un dispositif du type « intellectuel collectif », là où l’attachement sans partage, de Delaunay, à l’expérimentation de type universitaire, pour une psycho-pédagogie expérimentale « scientifique », dans une forme de travail solitaire, a provoqué une œuvre inféconde sans postérité. Frédéric Mole, Institut Jean-Jacques Rousseau de Genève, Equipe de recherche en Histoire sociale de l'éducation (ERHISE), université de Saint-Étienne Nous nous proposons d’analyser les conditions d’organisation de l’École du Mail, à Genève, lorsque celle-ci devient école expérimentale, sous la direction de Robert Dottrens de 1928 à 1952. Premier instituteur diplômé de l’Institut Jean-Jacques Rousseau en 1921, puis inspecteur, chargé de cours à l’Institut, acteur de l’adoption des résolutions en faveur de l’« adaptation de l'école active à l'école primaire » au congrès de la Société pédagogique romande de 1924, Dottrens se voit confier la double mission de développer et expérimenter des méthodes nouvelles et de les promouvoir dans la formation des institutrices et instituteurs du canton. La communication examinera la façon dont cette expérimentation pédagogique est mise en œuvre ; elle analysera les stratégies développées par Dottrens et les obstacles qu’il rencontre dans une période qu’il qualifie lui-même de « critique », où « l’introduction de méthodes nouvelles ne peut être retardée alors que le personnel enseignant est mal préparé à les accueillir et à les propager ». La recherche s’appuiera sur les publications de Dottrens et ses compte-rendu au Département de l’Instruction publique. Elle prendra aussi en compte les commentaires que l’École expérimentale du Mail suscite chez les pédagogues, dans les associations d’enseignants et dans le débat public (presse, discours politiques). Laurent Gutierrez, université de Paris Nanterre, Fernand Mory compte au nombre de ces « acteurs dont l’histoire à apprendre et à célébrer n'a pas retenu le nom et qui néanmoins, sur la scène effective où se déroulait l’action, ont contribué à ce que les choses se passent » (Hameline, 2017, p. 76). Géographe, instituteur sur le plateau de Langres puis inspecteur à Fréjus, il a en effet contribué, sur le terrain et à partir du terrain, à une plus grande prise en compte de l’hétérogénéité des classes, en s’inspirant d’abord des expériences d’individualisation de l’enseignement menées dans le cadre du plan Dalton (Mory, 1946), puis en développant un matériel pédagogique original publié chez Bourrelier sous le titre « Je travaille seul » notamment (qualifié par Freinet d’« excellente réalisation »). Nous souhaitons, dans le cadre de cette communication, interroger le caractère innovant de l’œuvre de Mory à partir de ses sources d'inspiration, de ses archives (dossier de carrière, articles et ouvrages parus dans les années 1940 aux années 1970) et des témoignages de ses contemporains. GUISEN, A. (1930). Le plan Dalton pour l'individualisation de l'enseignement. Bruxelles : Office de publicité. Emmanuelle Vollenweider, université de Genève Cette contribution revient sur l’introduction de la lecture silencieuse dans les programmes primaires dans les cantons de Fribourg, Neuchâtel et Genève et sur les discours pédagogiques qui ont accompagné cette innovation entre 1910 et 1940. Par l’analyse des discours dans la presse et des ouvrages pédagogiques, nous interrogeons la part innovante qu’implique l’inscription de cette approche dans les prescriptions. Pourquoi Neuchâtel est-il le premier canton romand à l’adopter en 1927, plus de dix ans avant la France ? N’y avait-il pas de lecture silencieuse auparavant dans les classes ? Nous étudierons les prises de position à ce sujet de deux acteurs, l’abbé E. Dévaud, qui a tenu la chaire de pédagogie de l'université Fribourg, et la chercheuse G. L. Anderson, qui a mené une thèse au sein de l’Institut Rousseau. Comme des effets de tuilage et de sédimentation s'observent dans les discours sur l’enseignement de la lecture, est-il seulement possible de dater un dispositif d'enseignement de la lecture pour faciliter la démarche comparative entre des espaces nationaux et transnationaux ? Il s’agit également de problématiser la tentation de mener cette analyse selon une perspective évolutionniste, qui a tendance à réduire l'histoire de la lecture en une transition de la lecture orale et publique vers une lecture silencieuse et privée (Haug, 2014). HAUG, H. (2014). Relecture critique de l'histoire de la lecture. Régularités discursives chez les historiens modernes. Le Moyen Age, CXX, 123-133. Anouk Darme, Anne Monnier, université de Genève Avec la mise en place au XIXe siècle des systèmes scolaires publics, la promotion des élèves d’un degré à l’autre va reposer sur une évaluation des apprentissages qui se solde par une note (Merle, 2018). Dans ce contexte, les autorités scolaires établissent les conditions et les critères de promotion et d'évaluation des élèves, dans lesquels les examens de français jouent un rôle-clé. Or, en Suisse romande, des critiques émergent à leur encontre au primaire dès les années 1860, qui atteignent leur apogée dans les années 1920. Ces critiques, portées essentiellement par les associations d'instituteurs, concernent à la fois les finalités, les modalités et les acteurs en charge de ces évaluations. Cette communication, qui prend comme empan temporel la période 1860-1960, se propose donc de traiter les questions suivantes : sur quoi portent exactement ces critiques ? Quelles tensions traduisent-elles ? Sur quoi débouchent-elles en fonction des cantons, souverains en matière d'éducation : adaptation ? expérimentation ? réforme ? Notre analyse repose sur un corpus archivistique constitué de documents produits d’une part par les autorités scolaires (lois et règlements sur l'instruction publique, programmes et plans d'études), d’autre part par les enseignants et les pédagogues (revues pédagogiques). MERLE, P. (2018). Les pratiques d'évaluation scolaire. Historique, difficultés, perspectives. Paris : PUF. Alice Spreafico, Bruno Védrines, Anne Monnier, HEP-Vaud A partir des années 1920, le texte littéraire prend une place centrale dans les manuels de lecture du primaire en Suisse romande et au Tessin (Monnier & al., 2023). Il s’agit donc bien d'une innovation fondamentale, mais il reste à en analyser le contexte, la portée et les conséquences. De ce point de vue, le concept de réputation littéraire nous aide à comprendre la constitution et l’évolution des corpus littéraires scolaires (Védrines, 2023). Notre communication se propose donc de répondre aux questions suivantes : quels textes littéraires et quels auteurs et autrices soumet-on à l’attention des élèves entre 1920 et 1970 ? Selon quels critères et en vue de quelles finalités ? Pour ce faire, notre analyse repose sur un corpus archivistique constitué des plans d’études et des livres de lecture pour le primaire moyen et supérieur ainsi que d'articles pédagogiques de Suisse romande et du Tessin. Cette analyse est mise en perspective avec les travaux existants sur cette problématique pour les aires linguistiques française et italienne. MONNIER, A., TINEMBART, S., DARME-XU, A., MASONI, G., et SPREAFICO, A. (2023). Le processus de didactisation du texte littéraire dans l'enseignement primaire en Suisse (Suisse romande et Tessin, 1890-1980). Didactiques & Disciplines, vol. 1, no 1, 29-48. Giorgia Masoni, Sylviane Tinembart, HEP Vaud. L’éducation aux médias fait partie des plans d'études actuels de la Suisse romande et du Tessin. Pourtant, les réflexions sur cet enseignement ne sont pas nouvelles. Après avoir retracé le déploiement (dès 1930) et le déclin de la radio-scolaire suisse (vers 1980), cette communication questionnera d’une part, la transformation des méthodes de transmission des savoirs scolaires liée à l’utilisation de cette innovation en analysant les débats et controverses qu’elle a générés et d'autre part, son développement lié aux régions linguistiques alors même qu’elle était institutionnalisée au niveau national (Pünter, 1959). Elle mettra aussi en évidence le cas du Tessin, seul canton italophone de la Suisse qui rend obligatoire l’utilisation de la radio-scolaire au secondaire 1 en 1945 (Solcà, 2004). Un corpus de sources variées publiées et audio-visuelles (rapports d'activités, programmes radio, etc.) sera analysé selon une approche comparative tenant compte des transferts culturels et de la circulation des savoirs (Fontaine et al., 2021). Cette communication donnera ainsi un aperçu de l’histoire encore peu explorée de la radio-scolaire en Suisse. FONTAINE, A., GENDRE, X., SAVOY, D., BUGNARD, P.-P., & MASONI, G. (2021). Penser la circulation des savoirs scolaires dans l'espace transatlantique : Émigration-transferts-créations (XVIIIe-XXe siècle). Le Bord de l'eau. Pierre Kahn, Marie Vergnon, Centre interdisciplinaire de Recherche Normand en Education et Formation (CIRNEF, UR 7454), université de Caen-Normandie
DENIS, D. & KAHN, P. (2003). L’école républicaine et la question des savoirs. Enquête au cœur Dictionnaire de pédagogie de Ferdinand Buisson. Paris : CNRS Éditions. Camille Roellens, laboratoire ECP, INSPE / université Claude Bernard Lyon 1) - site de la Loire La revue Le Messager Européen (1987-1996), lieu de rencontres et caisse de résonance du conservatisme culturel, pédagogique et politique ? Cette contribution procédera de l’histoire contemporaine des idées politiques et pédagogiques, sur fond de recherches en philosophie politique de l’éducation sur les mutations hypermodernes à l’œuvre dans ces domaines dans les démocraties occidentales. Elle se déploiera aussi à l’horizon d’un travail heuristique sur les mutations du paysage intellectuel français dans le sillage de la redécouverte antitotalitaire du thème démocratique à partir des années 1960. Le corpus travaillé sera composé des neuf numéros publiés - chez P.O.L (n°1-3) puis chez Gallimard (n°4-9) – sous la direction éditoriale d’Alain Finkielkraut dans la revue Le Messager Européen entre son lancement en 1987 et son arrêt en 1996[1]. Nous commencerons par un panorama synthétique de l’ensemble des prises de positions des auteurs relevant d’une forme de conservatisme culturel et politique. Nous montrerons ensuite comment ces prises de positions procèdent par réactions, souvent d’une virulence croissante, à l’encontre des changements dans l’école française des années 1980-1990 et en particulier les importants projets de réformes et d’innovations pédagogiques qui y ont cours. Nous esquisserons ensuite des pistes de discussion critique de ces prises de positions, en montrant que c’est en fait systématiquement la progression dans l’éducation de ce que Tocqueville appelle la double dynamique de l’égalité et de l’individualisme, qu’elles refusent.
10h15-12h Ateliers B (salles bâtiment B, campus 1) Atelier B1 : Nature et méthodes actives. Discutant : Willy HUGEDET. Salle B1-117 Pierre Dasi, CIRNEF (UR7454), université de Caen-Normandie Longtemps confidentiels, les jardins d’école émergent de la clandestinité au début de la Troisième République. Porté par la dynamique réformatrice des républicains, leur développement bouscule l’enseignement traditionnel. Ce qui s’est joué dans les jardins scolaires, de leur création à l’Entre-deux-guerres, renvoie à l’élan réformateur qu’a pu alors connaître, avec les méthodes actives, l’école primaire. Dès lors, pourquoi tant de discrétion dans les textes officiels ? Pourquoi les instituteurs ont-ils dû ferrailler avec les maires pour obtenir quelques arpents de terres ? Comment même expliquer l’éclipse des activités au jardin après la Seconde Guerre mondiale ? Des enjeux de la mise en place de ces jardins à leur relatif effacement, c’est ce que nous voulons montrer dans cette communication. Patricia Legris, TEMPORA, université de Rennes 2 Haute-Bretagne Cette proposition vise à mettre en évidence en quoi la matérialité des dispositifs et les pratiques pédagogiques des jardins d'enfants des établissements de l’ordre secondaire (collèges, lycées, cours privés) permet la transmission de valeurs bourgeoises. L’étude de ces structures éducatives présentées comme des innovations pédagogiques et pour lesquelles le ministère de l’Instruction publique décide de ne plus autoriser l’ouverture en 1931 sans signifier toutefois la fermeture de ceux ouverts précédemment, permet de mieux comprendre les ancrages territoriaux. Classes accueillant les 3-6 ans majoritairement dans les villes, avec des densités plus importantes en région parisienne et en Alsace-Lorraine, la création puis le maintien des jardins d’enfants activent des réseaux d'acteurs variés : inspections, familles d'élèves, directions des établissements. Les objectifs sont doubles : créer un vivier d'élèves pour faire perdurer l'établissement, et transmettre des valeurs en lien avec la socialisation primaire donnée majoritairement par les mères de famille. Les sources mobilisées sont des revues, des guides de parents, des archives privées (Collège Sévigné et Ecole alsacienne), municipales, départementales et nationales. Olivier Chaibi, Institutions et dynamiques historiques de l’Économie et de la Société (IDHES), CNRS : UMR8533, École normale supérieure (ENS) - Cachan, Université Paris X - Paris Ouest Nanterre La Défense, Université Paris VIII - Vincennes Saint-Denis, Université Paris I - Panthéon-Sorbonne, Université d'Evry-Val d'Essonne La contribution se propose de revenir sur une étude menée sur la pratique et les discours sur la forêt dans le guidisme et le scoutisme français. Initialement, l’étude se proposait d’étudier quelles visions et quelles pratiques les mouvements guides et scouts français (principalement les SDF, les SUF, la FSE et les scouts laïcs) avaient de la forêt à travers une enquête auprès de jeunes guides et scouts en Belgique et en France. L’analyse des revues et guides pédagogiques des différents mouvements guides et scouts français des années 1910 à nos jours montre que les activités spécifiques à la forêt occupent une place très limitée dans les activités scouts, ce que confirme l’enquête menée en ligne auprès de plus de 600 personnes. Toutefois, le corpus constitué montre que la forêt occupe une place centrale dans l’imaginaire des guides et scouts et détermine la pédagogie des mouvements. Le louvetisme est créé autour du le livre de la jungle, le guidisme autour de la "forêt bleue". Les distinctions initialement genrées des mouvements se retrouvaient dans des approches sexuées de la forêt. Au fur et à mesure que les mouvements se réforment et évoluent vers la co-éducation des filles et des garçons, la vision de la forêt et ses imaginaires changent pour devenir des facteurs d’unification et non de différenciation entre les filles et les garçons. En se centrant sur les progressions liées aux compétences et connaissances spécifiques à la forêt, on constate au fil des réformes des changements notables dans les paradigmes environnementaux liés à la forêt. Le scoutisme évolue au cours des réformes d’une pédagogie incitant à la maitrise et conquête de la forêt à celle de la protection de son environnement. Sara Trevisan, Institut des sciences et pratiques d'éducation et de formation, université Lumière - Lyon 2 Cette proposition de communication porte sur la réception des idées de Célestin Freinet en Italie, en particulier au travers des méthodes et réflexions pédagogiques de Mario Lodi, qui s’inspirent explicitement des idées du célèbre pédagogue français, mais en les renouvelant pour les adapter au contexte spécifique italien (et plus particulièrement du Val d’Aoste). Grâce à une réappropriation, un certain nombre d’enseignants ont pris en compte le contexte éducatif, historique, social et intellectuel pour proposer une pédagogie alternative à celle classique. La question de l’innovation est donc double : il ne s’agit pas seulement de se demander en quoi les méthodes pédagogiques de Lodi représentent une innovation par rapport aux méthodes traditionnelles en cours dans les écoles italiennes, mais aussi en quoi la retraduction des idées de Freinet par Lodi pour les adapter à un contexte particulier constitue elle-même une innovation ? Lodi est-il un innovateur ou un « applicateur » ? Notre étude associe histoire des idées et histoire des pratiques pédagogiques. La période considérée va de 1959 à 1972. Les sources utilisées sont les témoignages et les textes recueillis des enseignants du Mouvement de Coopération Éducative (M.C.E.) en Italie, le groupe valdôtain des écoles modernes, ainsi que les textes de Freinet et de Lodi. LODI, M. (2022). Cominciare dal bambino. Rizzoli, Milano. Dorena Caroli, université de Bologne La communication vise à comparer la réception de la pédagogie de Freinet en Russie et en Italie. Dans ces deux pays, Freinet s’est rendu respectivement en 1925 et au début des années 1950. Après avoir reconstitué le contexte historique de cette reception, on essaiera d’analyser les acteurs principaux, ainsi que les différentes expériences novatrices inspirées par les “techniques Freinet”. En Russie, sa méthode s’est immédiatement diffusée dans le contexte de la réforme de l’école nouvelle soviétique, ainsi que dans les institutions exstrascolaires. Ces aspects consistent en de nouvelles activités d’écriture et la rédaction de journaux dont la finalité est l’éducation politique de la jeunesse. En Italie, les techniques Freinet ont été adoptées dans le contexte de la réforme de l’école démocratique s’inspirant de l’activisme (Dewey) à partir de 1951. Le séjour de Freinet en Italie a donné lieu aux pratiques de l’imprimerie scolaire dans plusieurs écoles et institutions de prise en charge des enfants (Fano, Rome, Rimini et Varese). Il s’agit d’un phénomène connu comme la Coopérative de typographie à l’école (Cooperativa della tipografia a scuola), qui a stimulé un apprentissage plus efficace de la lecture et de l’écriture. Comme nombre d’études le montrent, dans cette période, il y a eu plusieurs maîtres et enseignants qui se sont servi des techniques Freinet pour renouveler la culture scolaire dans un esprit démocratique visant à effacer les traces de la pédagogie fasciste. BIGIARETTI, M. L. (1963). Letture. per il primo ciclo della scuola elementare. Milano : C.E.T.E.M. Martino Oppizzi, Ecole française de Rome Par cette communication, je me propose d’analyser l'application de la méthode pédagogique de Maria Montessori (1870-1952) dans les écoles italiennes à l'étranger, en me focalisant sur les cas de Tunis et Alexandrie d'Égypte. La période de l’Entre-deux-guerres voit la diffusion internationale de la pédagogie montessorienne, fondée sur la liberté et la spontanéité de l’enfant, mais aussi la fascisation massive des écoles italiennes dans le monde, visant à fabriquer un enfant discipliné et guerrier, fidèle à la devise "Croire, obéir, combattre". Contre toute attente, ces deux visions antinomiques de l’enfance trouvèrent, à l’épreuve des faits, un terrain d'entente. Les autorités italiennes locales tolérèrent la méthode Montessori, vitrine d’une école moderne et rationnelle. En échange, les programmes et les enseignants s’alignèrent progressivement sur l’idéologie fasciste, pour garder leur espace d’action. Les écoles de Tunis et Alexandrie offrent un tableau éloquent de cette convergence inouïe entre une pédagogie profondément humaniste et un projet d’encadrement totalitaire de la jeunesse. Dans le sillage du débat historiographique récent sur Maria Montessori et sur la base de la documentation produite par les écoles italiennes à Tunis et à Alexandrie (notamment les rapports des enseignants), cette contribution vise à réinterroger les notions de réforme et d’involution. En même temps, par une perspective comparée, elle invite à réfléchir sur le poids des contextes locaux dans la transformation – voire le dévoiement – des doctrines pédagogiques.
Atelier B3 : Symposium Innovation et engagement professionnel pour les éducations différenciées (1). Animateur : Martial MEZIANI. Salle B1-119 Martial Meziani, École, mutations, apprentissages, université de Cergy-Pontoise - Site de Gennevilliers Cette communication a pour ambition de questionner les parcours professionnels dans différents champs éducatifs des années 1980 à nos jours. Cette exploration s’appuiera sur sept récits de vie. Il s’agira d’interroger des parcours d’enseignants et d’éducateurs, pour saisir à l’échelle individuelle les effets des innovations sociales sur l’engagement. Cette perspective sociohistorique entend croiser les dimensions macro et micro-sociales, en s’intéressant plus particulièrement aux processus subjectifs liés aux effets de l’innovation sociale sur l’engagement. Les résultats montrent que les professionnels interrogés sont passés d’une éthique d'engagement collectif à une autre, où l’engagement se joue à l’échelle interpersonnelle, renvoyant à la responsabilité individuelle, notamment dans le cadre de mise en œuvre de dispositifs préfigurant l’école inclusive, tels que l’abandon des catégories de l’enfance inadaptée, la mise en place de partenariats inter-institutionnels ou les visites d’équipe plutôt que de classe. Un drame social du travail (Hughes, 1956, 1996) se dessine, où, pour faire son travail, l’engagement individuel prime sur les velléités collectives, donnant lieu à une forme de renoncement, cet aspect étant renforcé par les processus de reconnaissance sont d’ordre plutôt individuels que collectifs (Voswinkel, Gernet, Renault, 2007). HUGHES, E. (1956, 1996). Le regard sociologique. Paris : École des hautes études en sciences sociales.
Sébastien-Akira Alix, LIRTES (EA 7313), université Paris-Est Créteil Val-de-Marne (UPEC) Conçue comme une analyse sociohistorique de la réforme de l’enseignement à destination des Africains-Américains introduite par Booker T. Washington au tournant des XIXe et XXe siècles, cette proposition de communication porte sur les transformations des méthodes pédagogiques et sur les rapports de force politique en lien avec ces transformations. Booker T. Washington joue à cette époque un rôle de premier plan dans la défense des droits et de l’enseignement des populations noires des États-Unis. Après s’être formé au Hampton Institute, en Virginie, il fonde en 1881 la première école normale chargée d’assurer la formation des futurs enseignants africains-américains dans le Sud des États-Unis. Sa conception de l’enseignement, centrée sur la formation professionnelle, ainsi que son engagement militant connaissent, à l’époque, un succès considérable ; ils font l’objet de financements émanant de philanthropes des États du Nord des États-Unis et sont mis à l’honneur lors de l’Exposition universelle de Paris en 1900. À partir d’un examen de sources publiées et archivistiques, cette communication propose d’étudier les idées et la réforme de l'enseignement proposées par Washington en vue de favoriser l’émancipation des populations africaines-américaines des États-Unis. Cette communication met également en lumière certaines critiques, notamment formulées par W. E. B. Du Bois, à l’encontre des idées et de l’engagement pédagogique de Washington. ANDERSON, (1988). The Education of Blacks in the South. U. North Carolina Press. Aline Succar, doctorante université de Bordeaux Cette communication explore l’évolution des orchestres d’enfants en tant qu’innovations éducatives dans les camps palestiniens au Liban, en couvrant la période de 1948 à 2023. Elle examine la genèse de l’éducation musicale et sa progression jusqu'à l'établissement des orchestres d’enfants par l'institution BAS (Beit Atfal Al Sumoud) en 2007, avec le soutien d'organisations internationales. Adoptant une perspective historique, cette étude met en lumière les mécanismes spécifiques par lesquels ces orchestres ont contribué à la transmission culturelle, à la médiation intergénérationnelle, à l’interaction interculturelle, ainsi qu’à la promotion de l’inclusion sociale et internationale. À travers des sources diverses, comprenant des archives historiques et des entretiens avec des acteurs clés tels que les responsables de BAS, les assistantes sociales, les coordinateurs de l'enseignement musical, les enseignants, les étudiants et les parents, cette recherche offre un regard approfondi sur l'impact de ces initiatives. Pour conceptualiser l’innovation éducative, cette étude s’appuie sur les travaux d'Alain Kerlan, en mettant l’accent sur la création de nouvelles formes d'éducation musicale favorisant le développement de compétences transformatives chez les enfants. En intégrant des modèles d'enseignement musical mondialement reconnus tels qu’El Sistema et Démos, cette communication explore comment les orchestres d'enfants dans les camps palestiniens ont enrichi le développement culturel, social et émotionnel des jeunes. Valérie Peres, Centre de recherches éducation et formation (CREF, EA 1589), université Paris Nanterre
PERES, V. (2023) Influence de Françoise Dupuy dans l'enseignement institutionnalisé de la danse contemporaine en France. L’exercice de la marche comme exemple de transposition didactique, La Pensée d'Ailleurs, N°5, (accepté, à paraître).
Nathalie Dorval Verstraete, Centre Interdisciplinaire de Recherche Normand en Éducation et Formation (CIRNEF, UR 7454), université de Rouen Normandie Le Pack Numérique Lycéen est aujourd’hui envisagé par la Région Normandie comme une réponse innovante face aux inégalités numériques révélées pendant la crise sanitaire. Ce dispositif d’équipement numérique massif des élèves s’inscrit pourtant dans la filiation de multiples expérimentations menées, en France comme à l'étranger, depuis le milieu des années 1980. Certaines de ces opérations, à l'initiative de collectivités, ont d’ailleurs fait l'objet en France d'un travail de recherche (Un collégien, un ordinateur portable ; Ordina 13 ; Ordi 35). Ces travaux constituent un corpus pour une analyse historique du déploiement sur deux décennies de ces dispositifs, innovants selon leurs initiateurs. L'identification de caractéristiques communes questionne le rapport entre expérimentation et innovation. Ces opérations sont perçues par une partie des acteurs de terrain comme une injonction à innover et, malgré le postulat des décideurs selon lequel la mise à disposition d'équipements numériques individuels provoquerait des pratiques améliorant l’enseignement-apprentissage, les usages demeurent limités et souvent liés à des pratiques préexistantes, peu innovantes. KHANEBOUBI, M. (2010). Description de quelques caractéristiques communes aux opérations de dotations massives en ordinateurs portables en France. Atelier C1 Symposium Innovation et engagement professionnel pour les éducations différenciées (2). Animateur : Martial MEZIANI. Salle EE117 Valentin Duchemin, Institut d’histoire du temps présent, université Paris 8 Vincennes-Saint-Denis Le parcours de Maxime Prudhommeau atteste un engagement constant pour la cause de l’enfance déficiente. Cet instituteur s'est notamment illustré en proposant des procédés pédagogiques innovants. Ainsi, il dispense un enseignement concret par le moyen de jeux, de dessins et de projections cinématographiques. Chargé, dès 1928, d'une classe de perfectionnement à Paris, il s’investit dans l’Association des instituteurs publics d’enfants arriérés, publie sur l’utilisation du cinéma dans les classes d'anormaux, participe aux stages de préparation au CAEA, communique dans des congrès et intervient dans le cadre de l’Association des instituteurs cinéastes. Directeur du service de dépistage des enfants arriérés de Paris et responsable de la Commission Pédagogique pour l’enseignement du 1er degré du Front National Universitaire, il sera invité à déposer, à la Libération, un rapport sur « L’enseignement spécial » pour les besoins des travaux de la Commission Langevin. Auteur d’un test fondé sur le dessin, formateur au CNPS à Beaumont sur Oise de 1947 aux années 1960, Maxime Prudhommeau est un auteur dont l’engagement pédagogique est emblématique des tenants du mouvement de l’Education nouvelle en France. Lors de cette communication, nous nous attacherons à comprendre de quelle manière cet instituteur a milité pour un secteur délaissé en questionnant les options pédagogiques qu’il a défendues. Dans cette perspective, nous mobiliserons des archives privées et des archives publiques en complément de ses films et de ses écrits. Catherine Dorison, E.M.A, Cergy Paris Université La loi d’orientation du 30 juin 1975 concernant les personnes handicapées réorganise les modalités de leur prise en charge dans tous les domaines. Elle impose donc d’importantes réformes administratives, en particulier dans le domaine de l’éducation. Mais, profondément, cette loi énonce les principes de ce qui va devenir une évolution majeure de la société française puisqu’elle pose les fondements des politiques d’intégration scolaire progressivement mises en place dans le dernier quart du XXe siècle. Aimé Labregère représente le ministère de l’Éducation nationale dans les réunions de préparation de cette loi élaborée par le ministère des Affaires sociales. En analysant les différents articles qu’il rédige avant et après 1975, on peut comprendre comment ses convictions se forgent notamment au contact des expérimentations étrangères. On peut aussi mesurer le travail patient pour convaincre et faire bouger les positions à l'intérieur de l’Éducation nationale et tout particulièrement dans le secteur de l'enseignement spécialisé. L’analyse porte sur la période 1968-1990 ; elle s'appuie sur les archives des ministères des Affaires sociales et de l’Éducation nationale et sur l’analyse de revues (Les cahiers de l'enfance inadaptée, Réadaptation). BARRAL, C. et alii (2000). L'institution du handicap : le rôle des associations. Rennes : PUR. Matthieu Laville et Philippe Mazereau, CIRNEF, UR 7454, université de Caen Normandie Cette proposition de communication s’appuie sur un travail exploratoire visant à reconstituer les filiations pédagogiques et institutionnelles d’un courant minoritaire de l’enseignement spécialisé : celui des enseignants spécialisés qui, dès le début du XXe siècle, a contribué à la création de structures spéciales, à savoir des écoles autonomes de perfectionnement et des Instituts médico-pédagogiques. Cette étude est circonscrite entre 1907, date des premières structures spécialisées gérées par le ministère de l’Instruction publique (i.e. les structures pilotes qui fonctionnaient avant la loi du 11 avril 1909, officialisant la création des classes et des écoles de perfectionnement), et 1956, date du décret du 9 mars relatif aux annexes XXIV qui ont permis le déploiement du secteur médico-social privé non lucratif géré par le ministère de la Santé. Suivre certains itinéraires exemplaires de pionniers de l’enseignement spécialisé (par exemple Anglade à Alger, les époux Kremer à Poitiers, les époux Candelier à Grugny, Uranie Nouca en région parisienne, Prudhommeau à Paris, etc.) permettra de rendre compte de leurs pratiques pédagogiques innovantes à dimension clinique (Laville et Mazereau, 2021) permettant de proposer un enseignement sur-mesure à des élèves « anormaux ». Il s’agira également de resituer ces pratiques dans l’histoire du champ de l’éducation spéciale (Mazereau, 2002). A bien des égards, ces pratiques conçues en milieu scolaire ayant migré vers le secteur médico-social, sont aujourd’hui appelées à y revenir à la faveur du mouvement inclusif. Cette proposition s’appuiera sur des articles parus dans la presse spécialisée (Annales de l’enfance, Notre Bulletin, Revue pédagogique, Les cahiers de l’enfance inadaptée). Certaines données historiques sont issues de travaux en sciences humaines et sociales sur les débuts de l’enseignement spécialisé (Cordier, 2001 ; Mazereau, 2002 ; Hébert-Vassogne, 2013). CORDIER, V. (2001). L'établissement de Grugny. Quelques aspects de la politique d'assistance départementale de la Seine-Inférieure à travers les mouvements des populations 1910-1970. Maîtrise d'Histoire Contemporaine, Université de Rouen. Xavier Riondet, CREAD, université Rennes 2 Créées en parallèle à la Commission Langevin-Wallon avec l’aide de Gustave Monod, les classes nouvelles de la Libération occupent une place originale dans l’histoire de l’éducation française. Symbolisant aux yeux de beaucoup de militants pédagogiques la rencontre entre l’Éducation nationale et l’Éducation Nouvelle, ces classes expérimentales se développent de 1945 à 1952 et constituent à cette époque une tentative pour faire évoluer, par en bas, la pédagogie du secondaire. Au fil des années, une interrogation émerge : faut-il les considérer comme une expérience marginale vouée à disparaître ou y voir l’élaboration d’un nouveau mode pédagogique pour l’ensemble du second degré ? Après plusieurs débats et controverses sur ces questions, les classes nouvelles sont finalement transformées en classes pilotes en 1952 et disparaissent progressivement du paysage pédagogique. En s’appuyant sur des documents issus de fonds d'archives relatives aux classes nouvelles, cette communication se propose de s’intéresser à une question récurrente dans l’histoire des expérimentations pédagogiques : que faire de ces expériences et de ces dispositifs ? Comment évaluer, faire le bilan, prendre des décisions politiques à partir de ces actions concrètes ? Fabien Groeninger, laboratoire interdisciplinaire de Recherche en Didactique, Éducation et Formation (EA3749, UM208), université Paul-Valéry - Montpellier 3 En 1880, Paul Robin est placé par son ami Ferdinand Buisson à la tête de l'orphelinat Prévost à Cempuis dans l'Oise. Il peut alors expérimenter son rêve d’éducation qu'il a théorisé depuis les années 1865-1872 : proposer une éducation intégrale à la jeunesse ouvrière. La question est évidemment politique alors qu'il a adhéré à l’Association internationale des travailleurs. L’expérience de Cempuis s'achève toutefois en 1894 après une campagne de presse haineuse des forces conservatrices. Or, depuis la fin du XXe siècle, certains établissements catholiques affichent un programme d’éducation intégrale bien éloigné du projet d'émancipation de Paul Robin. Néanmoins, l'éducation intégrale peut être un levier de transformation de l'enseignement public, notamment si l'on s'interroge sur la transférabilité des dispositifs expérimentaux et les valeurs et principes de la République mis en jeu. BOULIN, A. (2013). Les internats d'excellence : la construction d'un dispositif. Carrefours de l'éducation, 36, 61-75. Natalia Golovanova, doctorante au laboratoire Lisec Nous nous proposons d’étudier la création d’un mouvement pédagogiquegermanophone au début du XXe siècle : la pédagogie Waldorf. Ce mouvement, désormais international, est un exemple qui s’inscrit dans une dynamique générale de rénovation de l’éducation en dehors des structures officielles. Tout au long de notre intervention, la question de l’innovation guidera notre examen : peut-on considérer cette pédagogie comme innovante au moment de sa création ? Et qu’en est-il aujourd’hui ? Une comparaison s’impose entre la pédagogie Waldorf et le mouvement de l’Éducation nouvelle en raison de la similitude de leurs lignes directives et de la proximité temporelle ; elle a été étudiée par plusieurs chercheurs, notamment en Allemagne (pour un état de l’art sur cette question, voir Frielingsdorf, 2012 ; voir plus récemment Schieren, 2016 et Barz, 2018). Nous analyserons cette pédagogie sous deux angles : tout d’abord, il sera question de sa fondation, de son caractère innovant à l’époque de sa création, en lien avec le courant de l’Éducation nouvelle ; ensuite, nous dégagerons les caractéristiques qui font l’originalité de la pédagogie Waldorf jusqu’à aujourd’hui. BARZ, H. éd. (2018). Handbuch Bildungsreform und Reformpädagogik. Wiesbaden : Springer Fachmedien. Josiane Grou, doctorante au laboratoire Lisec Nous proposons d’observer la vie du jardin d’enfants Steiner-Waldorf, originaire d’Allemagne. Elle s’appuie sur la pensée de Rudolf Steiner publiée, notamment, dans le livre L’éducation de l’enfant. Le mouvement pédagogique mondial fondé sur l'œuvre de Rudolf Steiner comprend aujourd’hui plus de deux mille établissements dans plus de cinquante pays. CHALMEL, L. (2004). La petite école dans l'école : origine piétiste-morave de l’école maternelle française. Berne : éditions Peter Lang Lionel Collon, Centre de recherches éducation et formation (CREF), équipe Savoir, Rapport au savoir et Processus de transmission Avant le tournant néolibéral des années 1980, la réforme de l’enseignement se pensait en termes de rénovation pédagogique. Ce thème culmine au tournant des années 1960 et 1970 et donne son nom à la commission instaurée par Alain Peyrefitte le 29 février 1968. Celle-ci aboutit pour le primaire à l’instauration du tiers-temps pédagogique par le décret du 7 août 1969. La rénovation de l'école élémentaire est présentée comme l’institutionnalisation d'expériences pédagogiques éprouvées dont la principale source d'inspiration se trouve dans l'expérience du mi-temps pédagogique et sportif mise en œuvre dans l'école Gambetta à Vanves à partir de 1950 par le Dr Max Fourestier. Ce moment réformateur permet d'interroger les effets de l’institutionnalisation de conceptions éducatives et de pratiques pédagogiques pouvant être rapprochées de l’éducation nouvelle. Pour réaliser ce travail, nous nous appuierons sur les archives de la commission de rénovation pédagogique, AN série F17 ter, 19870201/1-18, comportant notamment les documents de travail de la sous-commission de l'enseignement élémentaire, les comptes rendus de séance, les procès-verbaux et les documents de synthèse. LAFFAGE-COSNIER, S. (2013). L'élève accompli. Les innovations scolaires menées à Vanves par le Dr Max Fourestier (1950-1973). Thèse de doctorat en sciences du sport, Université de Franche-Comté. Willy Hugedet, Sébastien Laffage-Cosnier, laboratoire Culture, sport, santé, société - UFC (UR 4660), université de Franche-Comté Entérinée par l’arrêté du 7 août 1969, la réforme du tiers-temps pédagogique établit une nouvelle répartition de l’horaire hebdomadaire dans les écoles élémentaires et maternelles. Le samedi après-midi est supprimé tandis que le volume horaire global diminue de 30h à 27h, en vue du perfectionnement pédagogique des maîtres. Surtout, l'enseignement est désormais divisé entre les disciplines intellectuelles (français et calcul, 15h), les disciplines d’éveil (6h), et l’éducation physique et sportive (6h). Le temps dédié à cette dernière se voit en nette augmentation, à un moment où l'on souhaite « secouer le carcan scolaire » (Prost, 1992 : 78). Cette communication n’entend pas revenir sur le processus d'adoption du tiers-temps, version édulcorée du mi-temps pédagogique et sportif qui avait fait ses preuves dans plusieurs écoles expérimentales en France. Néanmoins, elle montrera que ce nouveau cadre institutionnel catalyse les idées et les expériences pédagogiques chez les acteurs de l’EPS, voyant dans la réforme un moyen de légitimer la place du corps à l’école. Ainsi, l’analyse des dossiers « tiers-temps », publiés dans la revue Éducation physique et sport (1970-1980), révèle ce dynamisme naissant en matière de pratiques éducatives spécifiquement conçues pour le premier degré. Pour autant, cette vitalité éditoriale n’a pas empêché l'échec de cette réforme en ce qui concerne l'EPS, partie abandonnée du tiers-temps dont seuls 10% des instituteurs respectent l'horaire réglementaire quelques années plus tard (Pascal, 1976).
Pierre Verschueren, Centre Lucien Febvre, université de Franche-Comté. Radiographie d’une nébuleuse : le colloque de Caen et la réforme de l’enseignement supérieur et de la recherche (1956) Les « Assises nationales de la recherche », organisées du 1er au 3 novembre 1956 à Caen, ont marqué leurs contemporains : sous la présidence de Pierre Mendès France, 250 scientifiques, industriels, administrateurs, fonctionnaires, parlementaires, journalistes se réunissent pour discuter de la réforme de l’enseignement supérieur et de la recherche (ESR). Les « douze points de Caen » qui lui servent de conclusion, série d’innovations qui seraient nécessaires à la modernisation de l'ESR, sont par la suite à de nombreuses reprises réactivés – jusque dans les manifestations « Sauvons la recherche » de 2004. Devenu lieu de mémoire, ce colloque serait en quelque sorte le cri de naissance d'une politique scientifique nationale, et pour l’enseignement supérieur un référent assez comparable à ce qu’est le Plan Langevin-Wallon pour les autres degrés d’enseignement. Par-delà la mythologie du colloque, construite dès sa clôture par certains de ses organisateurs, cette communication entend revenir, en mobilisant les méthodes de la prosopographie, sur la composition exacte de l’assistance du colloque : s’il a eu un tel retentissement, c’est surtout qu'il réunit en un lieu toute une nébuleuse d’acteurs multiples, parcourue de jeux de forces et de contre-forces, qu’il s'agit de retrouver derrière un unanimisme de façade. Une telle radiographie permet de se donner les mieux d’explorer plus finement la diversité des expérimentations et des modèles convoqués (et mis en concurrence), et la constitution progressive d’une série de lieux communs réformateurs qui structurent pour longtemps les discussions portant sur la politique de l’ESR. Alice Ernoult, Centre universitaire de recherches sur l'action publique et le politique. Epistémologie et Sciences sociales - UMR CNRS 7319, université de Picardie Jules Verne Les Instituts de recherche sur l’enseignement des mathématiques : l’implémentation d'une innovation au cœur d'une réforme (1968-1974) De 1967 à 1973, la commission ministérielle dite « commission Lichnerowicz », se réunit pour concevoir de nouveaux programmes de mathématiques « modernes » et réformer en profondeur l’enseignement de la discipline. Elle conditionne la réussite de cette réforme à la création d’Instituts de recherche sur l'enseignement des mathématiques (IREM). Ils ont pour missions d’organiser l’expérimentation des nouveaux programmes, d’assurer le « recyclage » des enseignants, ainsi que de concevoir et diffuser de la documentation. Créés progressivement à partir de 1968 au sein des facultés des sciences, les IREM ont la particularité de regrouper des enseignants de tous les degrés (du primaire au supérieur). En 1974, la plupart des académies de France métropolitaine sont pourvues d’au moins un IREM qui sont alors au nombre de vingt-cinq. Dans cette présentation, il s’agira de montrer comment, dans chaque académie, les acteurs locaux se saisissent, mettent en œuvre et déclinent les décisions prises au niveau national pour la création des IREM. Cet exposé sera l’occasion d'interroger le caractère innovant des IREM et leur articulation avec la réforme des « mathématiques modernes ». ENFERT (d'), R. (2021). Le colloque d'Amiens et la réforme des mathématiques modernes : des objectifs communs ? In CAHON J. et POUCET B. (dir.), Réformer le système éducatif. Pour une école nouvelle mars 1968. Rennes : PUR, p. 167-179.
Patrick Lechaux, Centre interdisciplinaire de recherche, culture, éducation, formation, travail Le tournant des années 1970 (mise en place du DUT carrières sociales) constitue un moment exemplaire, par-delà « l’innovation » revendiquée par le ministère de l’Éducation nationale, pour mettre au travail les questions soulevées. A deux reprises (1968 et 1972), les espaces de transaction entre les acteurs ministériels et locaux (Rennes) en vue de finaliser cette réforme vont déboucher sur des projets « révolutionnaires » selon leurs auteurs qui subvertissent « l’innovation » institutionnelle nationale. L’exploitation des archives des deux ministères et de l’Institut de travail social de Rennes montre que cette « innovation » interne à l’université doit être lue comme une véritable rupture en termes de « problématisation » (Foucault,) ou de « matrice épistémique » (Lechaux, 2020) à propos du modèle humboldtien de l4université. Les concepts théoriques foucaldiens d’epistémè et de « problématisation » et ceux de Cefaï (2012) –« champ d'expérience » et rythmes de temporalité– éclairent ce qui fait ou non rupture lors des réformes des politiques publiques : adaptation à l'environnement ou bien reconfiguration des figures épistémiques qui organisent « en profondeur » les transformations des politiques de formation. CEFAÏ, D., TERZI, (2012). L’expérience des problèmes publics. Paris : Editions EHESS.
Piero Simeone Colla, laboratoire AGORA 1 Cergy Paris Université, Mondes germaniques et nord-européens ; UR1341, université de Strasbourg Depuis l’amorce du chantier de l’école fondamentale (grundskola), la notion de « réforme permanente » a été le maître-mot de la politique éducative officielle en Suède. Son axe portant est l’engagement de l’expertise psychopédagogique ancrée dans les instituts de formation des maîtres dans la modernisation du canon des matières. Durant une longue phase d’expérimentation (1950-1962), la définition des « plans d’enseignement » est remise à une démarche ancrée dans l’observation des pratiques. L’exercice est la prémisse d'un transfert automatique dans l’architecture des disciplines des priorités fixées par le Parlement, en même temps qu’il suppose une démarche d'auto-évaluation suivie, assistée par les cellules de recherche de l'administration. Pour ce qui est de ses critères, l’histoire ressort des programmes comme une matière d’« orientation » tournée vers l’éducation à la citoyenneté. La transition entre différents « codes » dans l’élaboration des curricula, décrite par Ulf P. Lundgren (protagoniste de l'ancrage des réformes dans la recherche en sciences sociales, puis de la formalisation d'une approche par compétences au niveau de l'OCDE) trouve dans cette approche son application. En se focalisant sur les « révisions » (översyn) du nouveau curriculum, entreprises en 1967 et en 1978, la communication analyse la confrontation qui s’engage entre l'administration et l'association suédoise des professeurs d’histoire (HLF) autour de visions alternatives de la discipline, avec de nouveaux concepts normatifs (« actualité », « pertinence sociétale ») en tant qu’outils de délégitimation mobilisés d'en haut. Elisabeth Maizonnier-Payelle, CIRNEF (UR7454), université de Rouen Normandie Selon Cros (2017), l’innovation procèderait de la narration fictionnelle mettant en œuvre la subjectivité de la personne et de son imaginaire. Les Davidées (Guitton, 1967), institutrices de l'école laïque, sortantes de l’école normale de Digne en 1913, entendent se référer à l’œuvre de René Bazin, Davidée Birot, écrite en 1912, pour vivre leur foi laïque dans la période de publication du Dictionnaire de Pédagogie de Ferdinand Buisson (Dubois, 1996). De l’infusion littéraire à la diffusion sous forme d’un bulletin éponyme, édité entre 1916 et 1945 (Mounier, 2020), leur engagement personnel et communautaire, proche de celui d'Emmanuel Mounier dans l’effusion révèle-t-il les conditions ''spirituelles'' d'une inscription dans une histoire de l'école primaire au prisme d'une anthropologie relationnelle ? Notre enquête nous mènera au cœur de la « cathédrale » du Directeur de l’Instruction publique. De la rencontre des Davidées avec Jean Guitton et Mounier, qui reconnaît sa « dette spirituelle » envers l’institutrice Marie Silve (1874-1976), à la notion d’intuition de Buisson comme une des conditions de l’expérience des institutrices, nous traçons ce compagnonnage pédagogique, relevant de la volonté d’éduquer. Certaines conceptions éducatives de l’éducation nouvelle convergeraient avec l’éducation morale et sociale prônée par les Davidées, tout comme l’article de Mounier (2020), Une nouvelle théorie du langage, révèle son intérêt pour les travaux de Marcel Jousse (1886-1961), dans les années 1930. CROS, F. (2017, octobre). Innovation et société, le cas de l'école (vol 11). Iste Éd.
Nora Eguienta, Institutions et Dynamiques Historiques de l’Économie et de la Société (IDHES), université Paris 8 Vincennes-Saint-Denis En 1879, la loi Paul Bert prolonge la loi Guizot et oblige les départements français à ouvrir une école normale primaire. En 1882, le conseil général de Martinique crée des cours normaux dans l’unique lycée de la colonie. Toutefois, il faut attendre 1957 pour qu'une école normale mixte (EN) soit construite en Martinique, au lieu-dit Croix-Rivail et 1959 pour qu’elle soit une école « de plein exercice ». Si l’accès au statut de département français en 1946 permet à la Martinique de se doter d’une EN au même titre que tous les départements français, des rapports d’inspecteurs rappellent l'importance du sujet dès la période d'avant-guerre. Ainsi, cette communication souhaite saisir les particularités de la création de l’EN mixte de Martinique en 1957. Il s’agit de comprendre en quoi l’EN est une innovation pédagogique et matérielle (ancienne demeure coloniale transformée en lieu d’enseignement public) et constitue un exemple à l’échelle locale des débats contemporains sur la formation des maîtres du primaire en métropole et dans l’Empire français. Cette proposition se concentre sur la période de réforme nationale de l’enseignement, de 1946 à 1960, et utilise un corpus de sources administratives conservées aux Archives nationales et aux Archives territoriales de la Martinique (correspondances entre acteurs de l'éducation, rapports d'inspecteurs et délibérations du Conseil général de la Martinique).
Vendredi 14 juin 2024 Atelier D1 : Les méthodes d’enseignement en question aux XVIIe-XIXe siècles. Discutant : Pierre KAHN. Salle B1-117 Sylvie Jouan, Laboratoire Interdisciplinaire de Recherche en Didactique, Éducation et Formation, UM208 université de Montpellier Nous proposons de présenter une étude de cas inédite : Pierre-Antoine Oudin, instituteur de la ville de Mende, a porté l’ambition de développer une école mutuelle à partir de 1817, avec le soutien du préfet relayant la volonté du roi Louis XVIII, soutien s’effaçant progressivement face aux résistances locales portées par une municipalité catholique souhaitant instituer une école lassalienne. L’étude que nous proposons s’appuie sur les sources archivistiques du département de Lozère, composées des courriers entre le préfet, le maire et l’instituteur, ainsi qu’une centaine de feuillets rédigés par ce dernier s’efforçant de convaincre les autorités du bienfondé de cette nouvelle méthode. La correspondance s’étend depuis le projet d'ouverture de l’école en 1817 jusqu’à sa fermeture, faute de moyens, en 1823. Outre l’intérêt que ces écrits présentent comme témoignage précis du fonctionnement d’une école mutuelle sous la Restauration, la correspondance témoigne des très vives tensions politiques générées localement par la volonté étatique d’introduction d’une nouvelle méthode d’enseignement. C’est ce deuxième aspect que nous proposons d’analyser dans cette communication qui constituerait une occasion de problématiser historiquement quelques concepts clés du colloque à partir du paradoxe suivant : alors même que l’école d'État n'est pas encore formée, de sorte qu’il ne peut s’agir de réformer l’École, comment expliquer qu’une méthode pédagogique puisse être considérée par des élus comme une dangereuse innovation ? Est-ce à dire que la forme scolaire d'origine lassalienne constitue dès le début du XIXe siècle un frein au changement dans les écoles françaises ?
Angélique Blanc-Serra, CIRNEF (UR 7454), université Caen Normandie Portée par des philanthropes et la Société pour l’Instruction élémentaire, la méthode d'enseignement mutuel proposée par Bell et Lancaster s’importe en France sous la Restauration. Cette méthode, véritable renouveau pédagogique tant au niveau des modalités de transmission que de la discipline, connaît un grand succès. Dès 1815, des écoles mutuelles sont créées, principalement, dans les villes. Parallèlement, l’État s’empare également de la question (circulaire du 30 août 1816). Cette nouvelle approche est, dès sa mise en place, au cœur d’enjeux pédagogiques et politiques. Il nous semble donc opportun d’observer l’intérêt mais aussi les résistances portés à cette méthode mutuelle en Provence, tout en analysant la position des différents acteurs impliqués. Pour y répondre, les discours, correspondances, délibérations – tout en ne se restreignant pas à ces seuls supports – entreposés aux Archives nationales, départementales et municipales, seront étudiés attentivement. Cette investigation permettra également de s’interroger sur le statut de cette méthode pédagogique, car, dans la mesure où celle-ci a été à la fois investie par des philanthropes et par l’Etat, a-t-elle été perçue comme une innovation ou une réforme ? TRONCHOT, R. (1972). L’enseignement mutuel en France, de 1815 à 1833. Les luttes politiques et religieuses autour de la question scolaire. Thèse présentée et soutenue devant l'Université de Paris I.
Atelier D2 : Réformes curriculaires (2). Discutant : Laurent LESCOUARCH. Salle B1-118 Simon Catros, PRAG en histoire-géographie à l’INSPE de Paris (Sorbonne Université), docteur en histoire contemporaine, chercheur partenaire du laboratoire SIRICE (UMR 8138) Les programmes de l'enseignement primaire instaurés en 1882-1887 constituent une réforme majeure, perçue d'emblée comme telle par les enseignants et la société, quoiqu’incomplète, l'inscription des « devoirs envers Dieu » (cours moyen) précédé de l’« éveil du sentiment religieux » (cours élémentaire) au sein des programmes de l'école primaire semblant contredire la volonté ministérielle d’une laïcisation de la morale enseignée. Nous proposons d’étudier leur mise en œuvre dans les classes. BAUBEROT, J. (1997). La morale laïque contre l'ordre moral. Paris : Seuil.
Fabien Knittel, Centre Lucien Febvre EA2273, université de Franche-Comté Dès la fondation des premiers établissements d’enseignement agricole en France, notamment l’Institut agricole de Roville-devant-Bayon (en Lorraine, en 1826), les questions liées aux manières de transmettre des savoirs savants et/ou techniques sont centrales (Knittel, 2010). Nombre de ces pédagogies sont jugées innovantes comme les conférences agricoles proposées par Mathieu de Dombasle (1777-1843), directeur de l’Institut agricole. Ces conférences sont des déambulations savantes sur les terres de la ferme exemplaire au sein de laquelle l'’Institut a été créé. L’agronome lorrain y propose une observation raisonnée des cultures qu'il appelle « clinique agricole » (Benoît, Knittel, 2001). Ces choix pédagogiques sont au fondement de l’émergence de l’enseignement supérieur agronomique et de l’institutionnalisation de l’enseignement agricole en France (Benoît, Knittel, 2017). Néanmoins, toutes les pratiques pédagogiques initiées dans l’enseignement agricole au XIXe siècle ne sont pas innovantes. Par exemple, à l’école nationale d'industrie laitière (ENIL) de Mamirolle (département du Doubs), fondée en 1888, le système Guénon (élaboré vers 1838), jugé obsolète pour identifier les qualités laitières des vaches depuis la fin des années 1860, est toujours enseigné au début du XXe siècle. L’enjeu de cette communication est de proposer un cadre d’analyse historique de ces oscillations pédagogiques, entre innovation et conservatisme.
Zoé Peuch-Lestrade, Institut d'histoire moderne et contemporaine, université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, université d’Athènes L’historiographie caractérise la fin du XIXe comme un moment majeur de réforme des institutions universitaires en Europe, marqué par une compétition universitaire et une montée en puissance des sciences expérimentales. Il s’agit d'étudier la revendication des professeurs de sciences physiques et de mathématiques de l’université d’Athènes pour la création d'une faculté autonome des quatre existantes (théologie, droit, médecine, philosophie). La valorisation d'une idéologie du progrès et de modernisation dans les rapports de faculté et les discours de recteurs, sera questionnée à l’aune de la notion d'innovation, terme absent à l'époque. Les notions de réorganisation et de réforme s’imposent aussi dans les débats dès 1895 dans les champs académique et politique. La réorganisation interne de l'université invoquée dans le mémorandum des professeurs de sciences est rejetée au profit d’un projet une réforme des statuts de l’université. En 1899, le Ministère de l’Éducation grec propose alors un projet s'inspirant directement de la réforme universitaire portée par Liard en France, finalement abandonné devant la conjoncture défavorable jusqu'en 1904, date de création de la faculté. Nous questionnerons ainsi la pertinence dans ce contexte de la notion de réforme en montrant que ce processus d’autonomisation est le résultat d'un continuum d'innovations dans la pratique des professeurs. De plus, il prend forme grâce à l’appropriation d'idées réformatrices, notamment celles de Liard, dans un contexte transnational. CHARLE, C. (1994). La République des universitaires. Paris : Le Seuil. Olivier Chaibi, Institutions et dynamiques historiques de l'Économie et de la Société (IDHES) CNRS : UMR8533, école supérieure professorat éducation - Créteil, université Paris-Est Créteil Val-de-Marne (UPEC) Des programmes scolaires récents aux injonctions pédagogiques prodiguées par de nombreux acteurs du monde éducatif, la volonté de mettre en œuvre des pédagogies plus ludiques semble s’imposer comme un moyen d'innover dans les classes. La « gamification » ou « ludification » de la société annoncée par Jesse Schell au début des années 2000 touche nécessairement l’école et les apprentissages. En témoigne le marché du jeu pédagogique, réel ou virtuel, qui connaît un fort engouement depuis la fin du XXe siècle. Comme si cela ne semblait pas assez sérieux pour des historiens, rares sont les travaux historiques sur l’histoire du jeu, encore plus en éducation. Pourtant, les programmes et les publications scolaires ou éducatives témoignent d’une place ancienne du jeu dans l'école et les apprentissages. Si le jeu a pu servir à la propagande cléricale ou républicaine (jeux pour le catéchisme, jeu de l’oie républicain, etc.), il est encouragé par des inspecteurs, enseignants, professeurs d’école normale. Son évolution varie évidemment selon les âges (présent depuis les débuts de la maternelle, le jeu gagne progressivement l’élémentaire puis le secondaire) et les disciplines (associé au départ au sport ou aux arts, il gagne progressivement mais de manière inégale les différentes disciplines). La contribution se propose de montrer, dans un premier temps, l’évolution du jeu éducatif dans l'école et la société du XIXe à nos jours en montrant les débats qu'il a pu susciter sur son intérêt pédagogique et sa capacité à réformer ou non les pratiques pédagogiques.
Jean-Charles Buttier, Equipe de didactique de l'histoire et de la citoyenneté de l’université de Genève Ce colloque invite à travailler trois notions qui renvoient à l’idée d'un changement par rapport à un ordre éducatif antérieur. Cette proposition porte sur des expérimentations menées par des instituteurs du début du XXe siècle. Ces praticiens partagent une proximité idéologique avec ce que Pierre Monatte a qualifié « d'anarsyndicalisme ». Quelle est la place du jeu dans la pensée d’instituteurs comme A. Thierry, qui a prôné une « pédagogie d'action directe » à visée émancipatrice ? Ces instituteurs et pédagogues se saisissent du jeu pour penser les rapports de pouvoir à l'école. Comment jouer permet de lutter contre les dogmes ? Je m'intéresserai aux expérimentations du terrain. Dans une synthèse sur des « savoirs pratiques », V. Fage et J. Lamy analysent cette pédagogie sous l’angle d'une « forme de mètis pédagogique », notion qui renvoie à un savoir pratique qui implique des « compétences souples d'ajustement au monde ». Pour analyser cette expérimentation, je croiserai des écrits théoriques avec des jeux publiés dans Les Petits Bonshommes (revue pour enfants des années 1910). En identifiant les jeux publiés, j’examinerai la cohérence avec les propositions transformatives de pédagogues inspirant des jeux comme C-A Laisant ou J. Wintsch. BUTTIER, J.-C. (2021). L’élaboration collective d'une pédagogie antiautoritaire. Anarcho-syndicalisme et éducation à la veille de la Première Guerre mondial, Zilsel. 2021/2, n°9.
Noëlle Monin, Education, Cultures, Politiques (ECP), université de Lyon 2 L’avènement de l’air du loisir, son rôle éducatif de la jeunesse, la législation réglementant l’organisation des colonies après la Seconde Guerre mondiale (Fuchs, 2020), sont un enjeu pour l’UFCV (Chovaux, 2007). L’innovation devient la condition pour préserver sa place sur un marché concurrencé et sa reconnaissance par les pouvoirs publics. Dès 1946, le mouvement est précurseur pour la formation de l’encadrement. Il a su saisir l’opportunité de la création en 1949 du diplôme d’animateur et devient le premier organisme de formation au BAFA. Il crée en 1964 la première école d’animateurs professionnels. Dans les années 1970, l’UFCV s'inscrit dans le champ de l’éducation populaire, porteur de progrès, que Prost rattache au courant du catholicisme social. Malgré une rupture proclamée de l’UFCV avec sa dimension confessionnelle (Houssaye, 1989) et les finalités éducatives qui lui ont été associées, des ecclésiastiques et notables issus de milieux bourgeois et d’œuvres chrétiennes s’imposent encore au sein des instances dirigeantes jusqu’en 1980 (Lebon, 2003) ; cependant, l’attachement du mouvement au personnalisme communautaire, déclaré à cette date, le dégage de l’influence cléricale qui l’a construit. Nous analyserons dans quelle mesure les innovations que ses dirigeants ont su mettre en place pour l’inscrire dans une visée progressiste de l’éducation n'ont pas empêché de nourrir les finalités spirituelles qui ont toujours caractérisé l’UFCV. Nous procéderons à l'analyse de contenu de La revue des centres de vacances et de loisirs, publication mensuelle de l’UFCV, entre 1969 et 1980, période d'engagement dans le personnalisme communautaire. Joachim Benet Riviere, Groupe de recherches sociologiques sur les sociétés contemporaines, université de Poitiers Cette communication se propose d’analyser la manière dont l’origine et le développement des maisons familiales rurales - une institution de formation de l'enseignement agricole issue du mouvement de la jeunesse agricole catholique – ont été construites comme espace d’« innovations pédagogiques » à partir des années 1950. Cette reconstruction sociohistorique est le produit de la rencontre entre la volonté de légitimation de cette institution de formation et le développement du mouvement de l’éducation nouvelle qui trouve dans cette institution un terrain d'expérimentation de ses outils et de ses méthodes éducatives. Il s’agit donc saisir comment cette institution a cherché à se légitimer dans le système éducatif français en reconstruisant son histoire et ses dispositifs à partir d'une lecture en termes pédagogiques. Destinées initialement à former une « élite paysanne », les maisons familiales rurales se trouvant alors en difficulté dans les années 1950 car les évolutions du système éducatif et de l'agriculture les conduisent à renouveler leurs objectifs de plus en plus tournées vers une dimension scolaire. Dans les années 1930, les formations en alternance des maisons familiales rurales avaient pour objectif de permettre aux parents agriculteurs d’assurer la formation pratique de leurs enfants. Face à l'arrivée de jeunes issus de la massification scolaire (ayant connu des difficultés au collège), ses finalités se sont renouvelées à partir des années 1950, obligeant l’institution à reconstruire son territoire d’intervention.
Delphine Patry, Émilie Dubois, Centre Interdisciplinaire de Recherche Normand en Éducation et Formation (CIRNEF, UR 7454), université de Rouen Normandie Si des municipalités expérimentent les conseils municipaux d’enfants (CME) dès les années 1970, c’est surtout à partir des années 1990 que certaines s’emparent de ce dispositif qui vise à faire participer les enfants à la vie démocratique de leur ville. A partir d’ouvrages sur les CME et à partir d’archives de l’association nationale des conseils d'enfants et de jeunes, des CME de Mont-Saint-Aignan et de Rouen, nous nous interrogeons sur l’évolution de ces expérimentations. Nous questionnerons, à travers le cas de ces dispositifs innovants, la vision de l’éducation à la démocratie telle qu’elle s’y est développée et nous interrogerons ces espaces qui contribuent à donner une forme de matérialité à la parole des enfants dans l’espace public. Quelle expérience démocratique les enfants vivent-ils ? Comment y sont-ils accompagnés ? BOONE, D. (2016). À chacun sa place : la limitation de l'action politique des enfants dans la ville. Le cas des conseils municipaux d'enfants (CME). Les Annales de la recherche urbaine, (111), 90-99.
Claire Lucarelli-Jouan, doctorante en sciences de l’éducation, laboratoire Éducation, Cultures, Politiques (ECP) - UR 4571, université Lyon 2, Institut Français de l’Education - ENS de Lyon Conjuguant une volonté de réinsertion sociale à la pratique d’un art participatif, le dispositif expérimental étudié proposait à des adolescents placés sous main de justice de travailler bénévolement sur les chantiers d’artistes professionnels, au plus près du monde de l’art (Becker, 2010). Cette formulation singulière, dans le champ de l’éducation par l’art, se distinguait d’autres formes d’interventions basées sur les principes de l’art-thérapie (le soin) ou de la pratique artistique (l’expression). Pour cette communication, nous focaliserons notre propos sur l’origine de ce réseau d’acteurs au sein d’associations militantes des prisons de Lyon (1980-1995) et sur l’émergence d’un discours autour des vertus d’un travail coopératif avec des artistes plasticiens. Puis, passant d’un art carcéral à des chantiers artistiques d’insertion pour des jeunes « en difficulté », nous examinerons ensuite les circonstances de la transposition de cette expérimentation vers des organismes d’éducation spécialisée. Marie Vergnon, Centre interdisciplinaire de Recherche Normand en Education et Formation (CIRNEF EA 7454), université de Caen Normandie Van der Ploeg dénonce le Plan Dalton (début du XXe siècle) comme ne relevant pas de l’innovation dans la mesure où « Parkhurst [son auteure] a recyclé diverses idées et méthodes déjà développées et expérimentées ». Tyack et Tobin (1994) au contraire le qualifient d’« innovation », le prenant en exemple des propositions pédagogiques qui « remettent en question les structures et les règles qui constituent la grammaire scolaire » - entendue comme « le cadre organisationnel qui façonne les conditions dans lesquelles les enseignants instruisent les élèves ». C’est ainsi le sens même de l'innovation, dans ses rapports à la création et l'invention, à la (re)contextualisation et à l’institution, que nous souhaitons interroger à partir du « cas Dalton » en nous appuyant sur les écrits de Parkhurst et sur les discussions qui entourent le Plan Dalton dans la première moitié du XXe siècle en Europe francophone et anglophone notamment (témoignages d’enseignants, presse généraliste et pédagogique, actes de colloques, traités d’éducation), au prisme des travaux sur l’innovation en éducation.
Sébastien-Akira Alix, LIRTES (EA 7313), université Paris-Est Créteil Val-de-Marne (UPEC) Cette proposition de communication est conçue comme une analyse sociohistorique de la réforme progressiste de l’enseignement introduite dans la ville de Gary, Indiana, au début du XXe siècle aux États-Unis. A l’époque, la ville de Gary est en effet célèbre en raison du caractère progressiste de la réforme pédagogique qui y est initiée dès 1907 par le surintendant des écoles William A. Wirt. Wirt, un réformateur qui avait suivi les cours de John Dewey à l’université de Chicago, met en place dans cette ville un système d'éducation qui combine utilisation maximale des locaux et expérience éducative riche pour tous les élèves ; ce système qu'il appelle Work, Study, Play, également nommé Platoon System, est rapidement connu aux États-Unis sous le nom de Gary Plan. À partir d’un examen des sources publiées et archivistiques relatives à cette réforme, cette communication propose d'étudier les transformations pédagogiques associées à cette expérimentation pédagogique considérée comme un modèle de la réforme progressiste de l'enseignement. Cette communication met également en lumière la manière dont ce modèle pédagogique a pu circuler sur le territoire états-unien pendant cette période et souligne les débats, parfois houleux, auxquels il a donné lieu à l'époque. COHEN, R.D. & MOHL, R. A. (1979). The Paradox of Progressive Education : The Gary Plan and Urban Schooling. New York : Kennikat Press Corporation.
Sonia Birocheau, Institut des Mondes Anglophone, Germanique et Roman - EA 3958 (IMAGER), université Paris-Est Créteil Val-de-Marne Au tournant du XXe siècle, l’Association nationale pour l’éducation déclare que l'amélioration de la formation des enseignants qui exercent dans les écoles états-uniennes est « de la plus haute importance ». Pour les universitaires, directeurs d'école et responsables d'administration scolaire membres de cette association, l’acquisition continue de nouveaux savoirs et savoir-faire devient impérieuse afin de garantir la qualité de l'enseignement dispensé dans les établissements du pays. À l'occasion de ce colloque de l'ATRHE, j’aimerais réfléchir à la façon dont la réforme de la formation des enseignants états-uniens en exercice a été pensée et présentée à la profession, évaluer le caractère innovant des dispositifs mis en place, et analyser la réception de cette réforme par le public enseignant. À partir d'archives institutionnelles, professionnelles et individuelles, je proposerai une étude de cas de la ville de Chicago, alors centre de réflexion majeur en matière d’éducation, que je mettrai en regard avec l’évolution de la formation continue enseignante à l’échelle nationale. Cette présentation abordera les enjeux et la mise en pratique de la réforme de la formation continue des enseignants dans les premières décennies du XXe siècle aux États-Unis. LINS, L. J. (1945). Origin of Teacher Improvement Services in the United States.
Émeline Brylinski, Postdoctorante, ERHISE, FPSE, Université de Genève Au XXe siècle, les organismes internationaux se font garants du droit à l’éducation, formant ainsi les bases d’une gouvernance mondiale en éducation. Qu’en est-il pour un peuple nomade et transfrontalier ? Le cas des Roms est pertinent pour étudier ce phénomène : bien que certains États abordent timidement le sujet, conscients qu'une innovation pédagogique est nécessaire, ce débat reste en marge des préoccupations. Pourtant, les Roms se sont organisés à maintes reprises pour investir les enseignes internationales depuis les années 1930, mais ce n’est qu’en 1971 qu’ils inaugurent le Congrès international des Roms (1971). Le Comité International Rom (CIR) obtient alors, au gré des années, une reconnaissance formelle au sein de diverses institutions internationales, dont l'ONU (1979) : l’éducation se trouve parmi leurs toutes premières revendications. Or, la réception de ces idées par des organismes internationaux exige une démarche consensuelle pour élaborer une solution innovante qui se situe entre les besoins du peuple Rom et le besoin de contrôle exercé sur ces derniers par les gouvernements nationaux. Cette recherche, ancrée dans le courant transnational et l’histoire sociale, vise à problématiser comment ces démarches et négociations entre un peuple « sans-état », des gouvernements nationaux et des organisations intergouvernementales, parviennent à innover, voire réformer, d’une part le droit à l’éducation et son application, et, d’autre part les préceptes d'une gouvernance mondiale en éducation qui s’adresse en premier lieu aux gouvernements nationaux.
11h30-12h15 : Conférence de clôture. Youenn MICHEL : l’innovation et notre rapport au temps (amphi de Boüard)
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